Journal d’une vie en confinement à J-24.
Le 10 Apr 2020 | 4 Commentaires |
Une drôle de vie.
Je rangerai à la fin cet article dans la catégorie Lifestyle, mais j’aurai envie de nommer ce tiroir: « Strange life ».
Samedi 14 mars.
Je me renseigne. Je lis.
J’appelle une conseur/amie et nous échangeons nos premières sensations, réactions.
Je contacte mes collègues du centre de santé.
Et nous faisons le point dimanche soir avec mon assistante.
J’ai laissé dérouler le week-end sans prendre de décisions tranchées.
Il se trame quelque chose.
Lundi 16 mars au matin.
J’écoute mon instinct. Il me parait évident de fermer mon cabinet d’ostéopathie et ce jusqu’à nouvel ordre.
Je téléphone à mes patients inscris ce jour sur mon agenda afin d’annuler leur rendez-vous.
Ils ne sont pas surpris et réagissent bien.
En famille, nous partons en balade dans la neige. Je rencontre un collègue médecin également off suite à l’annulation de son séjour en ski de randonnée en Italie. Nous évoquons la situation. Il ne fait que confirmer mon choix.
L’annonce tombe le soir : confinement.
Mercredi 18 mars.
Ostéopathes nous faisons partie de la toile de soins. Cependant, nous ne sommes pas essentiels et indispensables en cas de crise. Acceptons-le.
Acceptons de laisser les patients là où ils en sont. Là, où nous avions réussi à aller, ensemble, dans un soulagement. Et leur faire confiance pour qu’eux-même garde confiance.
Acceptons d’arrêter les suivis de consultations . Nous reprendrons au fur et à mesure.
Notre rôle est ailleurs. Notre mission nous pouvons l’imaginer en dehors de nos cabinets.
Mes mains sont en pauses. Elles se reposent et se régénèrent.
Jeudi 19 mars.
Une question arrive très vite : comment être utile confiné ? Comment faire passer un message autrement que sur le terrain?
Vendredi 20 mars. Fête du Printemps
En couple, nous élaborons un planning où chacun peut trouver quelques heures seul, libre, à ne gérer personne sauf notre soi. Chacun pourra y trouver un espace de liberté pour s’accomplir.
Il nous faut du temps pour s’ennuyer, créer, imaginer, concevoir des projets.
Laissons-le filer, s’étendre, s’étirer.
Lundi 23 mars.
Je refuse en consultation une infirmière souffrant d’une lombalgie aiguë. Un épicier gêné à la hanche droite. Et une personne âgée embêtée par son épaule.
Vendredi 27 mars.
Sur les réseaux sociaux, je rentre en contact avec des professionnels ; entrepreneurs, philosophes, thérapeutes en psychologie positive, psychothérapeutes. Tous experts dans leurs domaines.
Là, je lis peu. Je préfère écouter, entendre. Ou écrire.
J’aime l’idée de construire des passerelles entre plusieurs professions. J’aime le partage de compétences. J’aime établir des connexions, des interactions et faire que deux mondes se rejoignent.
Je suis des ateliers en développement personnel et des conférences en ligne.
Je prends des notes dans mon carnet dédié à cela. J’entoure, je surligne. J’approfondis mes connaissances et découvre de nouvelles méthodes de travail.
Au travers de tous mes échanges, des portes s’ouvrent.
Cet échange inter-professionnels très formateur est une de mes révélations du confinement.
Mercredi 1er avril.
Le confinement me confirme une fois de plus que j’aime mon métier. Celui d’accompagner, d’écouter, de manipuler. Le contact avec les patient me manque.
Le toucher est en berne. On ne peut plus se faire la bise, se serrer les mains, même s’effleurer. Pourtant ostéopathes, nous sommes des métiers du toucher.
Et pourtant, nous avons tous besoin dès notre plus jeune âge d’être touché pour être rassuré.
Alors comment vivons nous ce vide?
Quels seront nos besoins post-confinement ?
Certainement entre autre, le contact les rires, la complicité.
Oui, ce contact qui reviendra luis aussi encore plus doux, plus chaleureux, plus bienveillant, plus nécessaire, plus fort.
Jeudi 2 avril.
« Avec certains êtres, très rares, il faudrait ne pas parler. Les mots sont inutiles. Les mots viendraient plus tard confirmer ce que les corps ont su dès les premiers instants. »
Laurence Tardieu.
Vendredi 3 avril.
Il est curieux ce terme, rentré comme par effraction, au coeur de nos vies : « Distanciation sociale ». S’éloigner pour mieux chérir. Marie Robert
Ou quand la distanciation sociale devient paradoxalement synonyme de rapprochement humain.
Mercredi 8 avril. Pleine lune rose.
Sans doute la plus forte de l'année, exacerbant les polarités contraires pour mieux accéder à sa totalité.
Cette pleine lune sous le signe de la Balance nous renvoie à l’autre, l’autre dimension du monde, l’autre dans son effet miroir de nos blessures et nos souffrances, l’autre version de l’histoire, l’autre encore et encore comme accès à l’amour, l’ouverture du coeur comme acceptation et sublimation de notre condition humaine.
Sophie Keller
Jeudi 9 avril.
Je remarque que ce confinement m’apprends à me lancer.
Je décide d’organiser des « lives » sur les réseaux et aborder le thème de la féminité et de la maternité en lien avec l’ostéopathie. Je choisis ce support pour communiquer, diffuser un message et garder du lien.
J’ose toquer aux portes. Et les personnes répondent présentes à ma plus grande joie.
Je leurs en suis particulièrement reconnaissantes.
Hâte toi de transmettre
ta part de merveilleux,
De rébellion, de bienfaisance…
Essaime la poussière,
Nul ne décèleras votre union.
René Char
Cette période inédite nous apprends beaucoup sur nous-même et le monde. Elle peut aussi nous révéler à soi-même. Nous permettre de nous connaître davantage.
Laissons aller notre créativité.
Émilie.