LIVE #4 : Le tissage du lien mère-enfant.
Le 04 May 2020 | 947 Commentaires |
// 22.04.20 en direct avec @Coraliejoos, mannequin et fondatrice de Riky_ maman de Clyde 17 mois //
Ce sujet est peut-être plus vaste, à la différence de la grossesse ou de l’accouchement, car non limité dans le temps.
Nous aborderons ce lien autour des enfants de 0 à 2 ans pour illustrer l’histoire de Coralie et Clyde.
Certains concepts m'ont servi de point de départ pour mieux vous l’expliquer. En réalité ce tissage est beaucoup plus intuitif et intime.
Dans les premiers jours suivant la naissance, la femme repense à son accouchement en restant la plupart du temps collé sur ces sensations physiques.
Ensuite, au fur et à mesure que les jours, semaines, mois passent, les pensées évoluent et le récit de naissance se définit. La femme oublie la douleur et garde en mémoire sa fierté, sa victoire ou alors à l’inverse un sentiment d’échecs, de doutes.
À un an et plus de ton accouchement, quel est ton sentiment ?
C.J: J’ai vécu un accouchement super beau et super bon parce que je suis allé dans tous mes choix dès le départ. D’abord la préparation a porté mon bébé. J’avais besoin de mouvement. Alors je suis allé à la piscine tous les jours jusqu’à 8 mois et demi, 1h par jour, où je m’exerçais au souffle. Chaque inspiration et chaque expiration, chaque battement de bras me préparaient à ce futur accouchement, à la grande course. Du départ, je souhaitais un accouchement sans péridurale avec évidement l’idée de ne pas se mettre en danger ni moi la maman, ni notre bébé.
Puis, j’ai découvert un cri de félin ! Je suis une warrior ! J’avais mon but à atteindre mais est-ce que j’aurai la force en moi d’y arriver ? Rien n’était sûr. Je gardais les yeux fermés et ne pensais qu’à mon objectif. J’ai eu une excellente récupération post-accouchement. Maintenant, à chaque nouvelle mission de vie je me dis « c’est bon je sais faire » parce je me suis révélée une force intérieure.
Les femmes ont besoin de revisiter leur enfantement et pour cela quoi de mieux que d’en parler, de le raconter pour la transmissions de leurs richesses entre elles et pour leurs enfants.
Les femmes n’oublient jamais leurs histoires d’enfantements. Interrogeons par exemple cette grand-mère de 90 ans.
Toutefois, un bébé en bonne santé et un accouchement par voie basse ne sont pas les seules finalités victorieuses d’une naissance.
En effet, si la femme s’est écoutée et à respectée son intuition, son accouchement lui apparaît comme parfait et agréable pour elle. À l’opposé, si une femme accouche de façon traumatique ou subit ou qu’on lui empêche d’accéder à sa propre intuition, son expérience d’accouchement peut devenir insupportable et angoissante.
Il est alors important de réparer, apaiser cette douleur. Et pour cela, il faut oser revisiter son récit de naissance et déconstruire chaque étape où la femme a eu le sentiment de perdre le contrôle, de ne plus décider, d’être boulversée. Le récit de naissance n’est pas seulement l’accouchement mais aussi la conception et la grossesse.
Est-ce que au cours de ta grossesse tu t’es sentie déstabilisée ? Et si oui, à quelle étape ?
C.J: Au premier jour. C’est un bouleversement à l’échelle du couple car mon mari est porteur d’une maladie génétique donc on devait avoir recours à une FIV. Seulement, dès le premier jour du rendez-vous avec la professeur j’étais déjà enceinte de deux semaines sans le savoir.
Perturbant aussi parce que ce n’était pas le chemin qu’on avait décidé. Et puis il fallait que je l’annonce à mon partenaire. Enfin, les choix à prendre se sont imposés immédiatement: interrompre cette grossesse ou attendre trois mois pour faire une biopsie afin de savoir si oui ou non le bébé est porteur de la maladie. En attendant tous les changements et symptômes d'une grossesse sont là.
Par rapport à ta grossesse et ton accouchement, quel tissage post-accouchement avais-tu besoin de créer ?
C.J: Une fois Clyde dans mes bras, j'avais besoin de créer un tissage unique maman, papa, et bébé. Mon seul besoin était de découvrir mon enfant.
Comment as-tu fais pour retrouver un alignement, une unité dans ton corps physique et psychique après ton accouchement ?
C.J: Grâce à mon premier soin une semaine après mon accouchement : le resserrage du bassin qui m’a permis de refermer la porte de mon intimité. Et des séances de shiatsu.
Quels ont été tes modèles, tes inspirations ?
C.J: Ma mère, maman de trois enfants. Ma sœur. Je repensais à certaines de tes phrases. Ma belle-sœur. Des amies.
Quand on reconnaît le tissage de la naissance comme un fil conducteur du devenir parent et famille, on comprend l’importance d’accompagner au mieux les femmes à travers leurs accouchements pour leur estime maternelle et leur lien d’attachement mère-enfant.
On ne peut pas tisser à la place de la femme mais on peut l’accompagner, l’écouter, la soutenir sans la juger. Et même si on ne change pas le déroulé du passé, on peut l’aider dans un travail de résilience.
Illustration @Guadypleskacz
Il est parfois difficile de trouver sa place de mère aujourd’hui. Des chemins sont encore à trouver pour que les femmes et les hommes puissent concilier le fait d’être mère et père avec leurs propres évolutions personnelles et professionnelles.
Plutôt que d’être tiraillé dans chacun de ces rôles : femme – mère – maman, on va essayer de les vivre en complémentarité.
Pour cela, je vais m’appuyer sur le concept développé par Maitie TRELAÜN qui distingue :
- La femme : elle représente la sensualité, l’autonomie notamment affective, avec une énergie sexuelle qui circule en elle et/ou vis à vis d’un partenaire. Dans nos relations mère et maman il n’est pas question de sexe.
- La mère : avec une responsabilité éducative, garante des règles de vie dans la maison.
- La maman : incarne la joie, le rire, le jeu, les câlins.
Cette distinction peut nous interroger: quel a été mon modèle de mère ? S’est-elle autorisé à être pleinement femme ? Quel rôle m’est facile ou au contraire plus difficile à adopter ?
En parallèle du développement de Clyde, à quel moment t’es-tu senti maman, mère, femme ?
C.J: J’ai senti la maman dès le départ avec la mise en place de l’allaitement. Puis le côté femme a voulu reprendre le dessus aidé par ma propre mère. Pour ma part, c’est passé par la symbolique des vêtements et la transition entre le port de mon bébé en écharpe et la poussette. J’ai pu réinvestir mon espace corporel et retrouver des petits temps pour moi.
Il me paraissait essentiel d’aborder la liberté pour se dé-culpabiliser. Les parents ne sont pas des supers-héros. Mais bien des personnes qui commettent des erreurs.
Commençons par la liberté de choix ou plutôt le fait d’oser être libre dans ses choix. C’est à dire les exposer clairement, les affirmer, et les respecter sans crainte que l’on me juge.
La liberté émotionnelle concerne ici nos limites personnelles en tant que parents. Souvent notre limite est fixé par nos propres sentiments. Tous les jours, en fonction de nos enfants, et de la situation nos sentiments changent. Accepter d’être imparfaits et être inconstants. Nous ne sommes pas toujours affectueux, réceptifs, ou tolérants avec nos enfants. Nous avons tous notre zone d’acceptation et d’inacceptation.
Comment gères-tu tes émotions et ta disponibilité avec ton bébé ?
C.J: Pour ceux qui me connaissent j’ai des humeurs changeantes.
Aussi, nous avons un bébé qui dors seulement depuis trois jours. Il a donc fait ses nuits à 17 mois. Alors il y a certains matins on se réveille à l’envers et va bien falloir gérer ses émotions pour protéger Clyde. Ma solution c’est de ritualiser au maximum du matin au soir. J’essaye de pas lâcher en faisant du mieux que je peux. J’aime bien mon mantra : les re« pères » - « mères »veilleux !
Avant d’avoir un enfant quelles étaient tes idées et représentations de la maternité, et depuis l’arrivée de Clyde ont-elles changées ?
C.J: Non je n’avais franchement pas d’idées. En revanche, je croyais que les choses iraient très vite. En réalité j’ai appris à prendre le temps avec Clyde. Toutes les étapes prennent du temps : le passage du dos au ventre, le quatre-pattes, manger seul, parler. J’ai remarqué que le temps est essentiel pour son évolution.
Cette lenteur est d’autant plus présente en cette période de confinement, de quelle manière tu l’apprivoises avec ton enfant ?
C.J: Cette situation inédite n’a rien à voir avec mon quotidien. Au départ, j’étais à fond dans les activités. Ensuite je me suis dit : « relâche » ! Je me suis rendu compte que je m’épuisais et Clyde était en sur-régime. Jusqu’aux jours où l’on est simplement sortis dehors à observer les petits insectes. Là, j’'étais plus efficace.
En effet, pour aider efficacement un enfant à satisfaire ses besoins et résoudre ses problèmes il faut apprendre à le comprendre. Ceci passe par une écoute appropriée à leurs messages. À des messages non verbaux (les 0-2 ans n’ont pas la parole claire) employons une méthode non verbale, notamment les gestes, le mouvement. Il y a donc une nécessité de passer du temps avec le bébé, de lui consacrer du temps de présence pour décrypter son langage.
Est ce que ce nouveau rythme t’a permis de trouver, découvrir des nouvelles solutions en tant que parents ?
C.J: En observant Clyde, je m’aperçois qu’il adore les petites taches qui à son échelle est capable de réaliser. Par exemple : aller chercher ses baskets, son manteau, son gouter dans le placard.
Il sait faire encore une fois à force de répéter et de ritualiser. Je le vois gagner en autonomie.
Un parent efficace donne à l’enfant la chance de répondre à ses problèmes lui-même avant de lui proposer des solutions. Laisser à l’enfant la responsabilité de résoudre son problème. On peut l’accompagner, l’aider sans lui donner la réponse trop vite.
Le parent fait ce qu’il peut, avec ce qu’il a, avec ce qu’il a vécu. N. FRATACCI
En conclusion, être parent c’est aussi s’adapter, se réajuster tous les jours selon nos humeurs, et toute la vie au fil de nos enfants qui grandissent.
Il peut y avoir des loupés mais tout se répare même des années après.
Références :
- Maitie TRELAÛN https://www.naitre-femme.com
- Livre : Parents efficaces Professeur Thomas Gordon