LIVE #3 : Le récit d'une naissance, la re-naissance du corps.
Le 02 May 2020 | 7 Commentaires |
// 20.04.20 en direct avec @ClémentineLevy, designer floral et fondatrice de PEONIES, maman de Nikki 1 mois //
Nous retracerons l’accouchement, des premières contractions à la naissance.
L’enfantement est un voyage vers l’inconnu qui peut surprendre et faire peur si on n’est pas bien préparé.
J’encourage les femmes à mettre leurs intentions au clair, avoir confiance au processus et s’entourer de personnes qui croient en votre capacité d’accoucher.
Déjà dans la fin du 3e trimestre, l’attention est centré sur l’arrivée de l’enfant et l’éminence de l’accouchement. Les quelques jours avant, on a veillé aux derniers détails : chambre de bébé, valise bouclé, c’est que l’on appelle faire le nid, et c’est déjà la première phase de l’enfantement.
Puis, les contractions débutent et la perte ou non du bouchon muqueux laissent entendre que le voyage est sur le point de commencer. Le travail est réellement là.
Quand et comment as-tu ressenti tes premières contractions ?
C.L : Mon accouchement fut long mais pas éprouvant. J’ai été déclenchée car Nikki était à J+3 . J’ai été en travail toute la journée toujours avec le col fermé. C’est seulement au moment de me coucher dans ma chambre à la maternité que j’ai perdu les eaux. À partir de là, j’ai eu ma première contraction au bout d’une heure.
On n’accouche pas dans la réalité ordinaire, celle que l’on connaît dans la vie de tous les jours. Pour accoucher, on a besoin de quitter la réalité, le connu, pour partir vers un ailleurs aussi loin que l’inconscient, là où naissent les bébés. Pour s’y rendre, c’est une panoplie d’états, d’énergies, de sensations à traverser. C’est ce que l’on appelle le vortex de la naissance.
À quel moment tu t’es senti t’échapper ?
C.L : Au moment de la délivrance pas avant. Car tout était très médicalisé auparavant avec le protocole de déclenchement plus la péridurale. Le conscient était bien là. Ensuite, j’ai gardé en tête une phrase de Coralie qui disait "ferme les yeux et ne pense à rien d’autre que toi, ton bébé, et ton homme. Reste focus". Je me suis mise dans ma bulle, dans un état où il fallait aider Nikki à sortir sans me préoccuper de l’extérieur.
La mère s’éloigne de plus en plus, les sensations deviennent de plus en plus fortes, intenses, puissantes, avec différents degrés de douleur selon les femmes. Les vagues de contractions sont rythmées, coordonnées, répétitives.
Entre ta première contraction et le moment le plus intense qui est l’état de plus grande ouverture que peut atteindre une femme, quel temps s’est-il écoulé pour toi ? Et quelle ont été tes sensations durant ce passage ?
C.L : La délivrance a duré 1h après 36 heures de travail. J’étais vidé, plus de forces. Nikki était coincé dans mon bassin alors c’était le branle-bas de combat dans la salle d’accouchement jusqu’au moment d’ouverture extreme qui est phénoménal.
Aux premières contractions, la femme peut être loquace, excitée, un peu nerveuse. Au fur et à mesure, elle peut voir son attitude changer, évoluer, avec des sentiments de peurs, doutes, craintes s'installer et un besoin de se replier sur elle-même dans le silence. Jusqu’au moment de la fragmentation, un éclatement de repères.
Comment as-tu embarqué aussi ton partenaire dans ce voyage ?
C.L : C’était vraiment un souhait d’avoir un enfant au bout de huit années de relation ensemble. Ludo a été impliqué tout le long de ma grossesse en passant par différentes phases sur la fin puisque nous nous sommes préparé à toutes les versions possibles: évidement l’envie d’un accouchement naturel, ensuite une possibilitée de césarienne programmé à cause d’un placenta praevia. De toute façon, dès le premier jour je m'étais dit: "ne te fais pas de film sur ton accouchement puisque ça ne ressemblera pas à ce que tu auras en tête car tout peut arriver".
Enfin, le bébé glisse dans un nouveau monde. C’est le passage du monde aquatique au monde aérien. Le bébé initie sa respiration, sens les odeurs, ressens le contact de l’air sur sa peau pour la première fois. Sa mère le reconnaît, le découvre. Le lien mère-enfant se produit à tous les niveaux : physique, psychique, spirituel avec amour et admiration.
Quel a été ton premier réflexe quand tu as vu ton bébé ? Ton premier sentiment ?
C.L : Il est tout doux ! Sa peau était toute douce. Soulagée avec l’impression de le connaître déjà. Je savais que c’était mon bébé et je le connaissais déjà par coeur.
À travers les éveils de son bébé, la femme vit une expansion de son être, elle passe de femme à mère.
Les 40 jours après l’accouchement correspondent au post-partum immédiat.
Il existe une période de SAS entre l’avant et l’après. Entre notre vie, notre corps, et notre rythme d’avant et d’après.
On ne revient pas indemne de son accouchement.
Le premier mois de vie est la suite logique de cette naissance et re-naissance.
Le post accouchement immédiat est une période délicate.
L’enfant est tout juste « éclos » que la mère se retrouve dans un monde sans repères avec un corps en complète ouverture qui mettra un mois à se refermer.
On est fragmenté en mille morceaux. C’est une période de grande vulnérabilité. Nos muscles manquent de tonus. Notre cerveau rationnel est inopérant. On manque de dynamisme. En tout cas tout nous pousse à se reposer pour éviter de fragiliser son corps davantage notamment notre périnée.
Quels étaient tes besoins en post-natal immédiat sur le plan physique et émotionnel ?
C.L : Ma ceinture abdominale me faisait extrêmement mal, et j’avais le souffle coupé. Mes besoins étaient complexes car j’ai accouché 4 jours avant le confinement avec une sortie anticipée. Sauf que mon besoin premier c’était de présenter mon bébé à ma famille et de partager cet évènement avec eux. D'être entouré. Toutefois, c’est aussi une chance de vivre ces 40 jours tous les trois « en pause ».
Justement, le post-accouchement c’est un temps de lâcher prise sur « tout ce qui n’est pas comme d’habitude » ou des « moi je l’aurai fait comme ça ». Développer cette capacité à laisser faire, prendre ce qui vient et vivre l’instant. Savourer la lenteur, « le slow ».
Est-ce que cette notion de temps t’a été facile à adopter ?
C.L : C’était difficile pour moi car c’est dans mon caractère d’être hyperactive et de vouloir contrôler. La mise en route de l’allaitement a été assez complexe et m’a créé beaucoup de pressions et d’impatience à l’inverse. J’ai trouvé mes solutions chez mes amies et avec une accompagnante disponible qui m’a déculpabilisé, en me faisant lâcher prise. J’ai repris confiance en moi et en Nikki.
Ce premier mois c’est aussi un temps pour ouvrir son coeur et se rendre disponible pour la rencontre avec son bébé. Il faut apprendre à faire une transition entre l’enfant que l’on attendait et accueillir celui qui est là. C’est une découverte perpétuelle. Tout est première fois : le bain, la nuit, l’allaitement, le biberon en réalisant que l’on a pas le mode d’emploi. Nous allons l’observer pour comprendre son language et répondre à ces besoins.
Comment avez-vous fait connaissance ?
C.L : J’ai eu une réaction assez forte que l’on appelle le syndrome du ventre vide, a pleurer pendant 3 jours à mon retour à la maison. Inconssolable. Je devais me faire à l’idée que mon ventre ne serve plus à rien d’autre qu’être mon corps. Nikki réagissait tellement aux changements quand je le portais que je me posais la question : est-ce que maintenant qu’il est « dehors » ce sera pareil ? En effet, les pleurs sont difficile à supporter pour ma part. Dans mon ventre il était « safe ». Or là, c’est assez déroutant de l'entendre pleurer sans parfois comprendre ce qu'il veut. Et puis il faut aussi apprendre à le partager.
C’est également une période de fusion avec son bébé. La mère est plutôt tourné sur elle-même dans une fusion indispensable pour l’un comme pour l’autre mais qui parfois inquiète avec la crainte de ne plus exister et une fatigue présente.
T’es tu posé la question : comment vais-je pouvoir répondre aux besoins constants de mon bébé et à ceux des autres en l’occurrence mon partenaire et moi-même ?
C.L : Avec mon compagnon on se connaît depuis longtemps donc on arrive facilement à trouver notre équilibre dans le couple. Avec mon entourage famille et amis je suis rassurée. Ils comprennent mon manque de disponibilité. Par contre d’un point de vue professionnel (mon café, la saison des mariages) la gestion de mon quotidien avec mon bébé me fais plus peur.
À un mois espacé de ton accouchement, commences-tu à ressentir le besoin de renouer tranquillement avec le fil que tu avais laissé entre parenthèse ? Ton rythme a t-il changé ?
C.L : Le sur lendemain je suis allé dans mon dressing et j’ai testé mes jeans. Je voulais retrouver la Clémentine d’avant avec mes petits plaisirs par exemple : mes vêtements, les plats que j’aime. J’ai hâte de renouer avec mon corps plus que de renouer avec ma vie d’avant.
Cette période des 40 jours post-natal, quand la femme respecte sa vulnérabilité, prends soin de son féminin, son bébé va pouvoir s’appuyer sur elle en confiance pour grandir.
Références :
- Karine LANGLOIS sage-femme, doula - https://quantikmama.com/
- Leslie LUCIEN doula - https://leslielucien.com
- Soin reboso avec Anne BELARGENT, doula:
https://shows.acast.com/la-plus-belle-maman/episodes/le-rebozo-avec-la-doula-anne-belargent
https://www.instagram.com/rebozo_therapy/?hl=fr
- Livres:
Vivre sa grossesse et son accouchement Isabelle BRABANT
Se préparer en couple à l'accouchement MaÏtie TRELAÜN
J'accouche bientôt que faire de la douleur MaÏtie TRELAÜN
Bien-être et maternité Bernadette DE GASQUET
Pleurs et colères des enfants et des bébés Aletha SOLTER